L'Heuristique: Journal des étudiants de l'ÉTS

L’expérience japonaise

Septembre 2013 » Voyages » Par Jean-François Pambrun, étudiant de doctorat

Image pour L’expérience japonaise
 
Parc du palais impérial de Tokyo. En plus d’être accueillant et courtois, le Japon est extrêmement propre. Contrairement à Montréal, il n’y a aucun déchet ou mégot de cigarette en vue.
Image © Jean-François Pambrun

J’écris ces lignes alors que je suis au bord du vol AC002 reliant Tokyo à Toronto. C’est un long vol, plus de 6 500 miles, qui doit durer environ 11 heures. Étonnamment, l’heure de départ était à 16 h 20 et l’ordinateur de bord estime notre arrivée à 14 h 55 le même jour. Le 18 juillet sera donc le plus long jour de ma vie à environ 35 heures, dont plus de 24 d’ensoleillement. Le jet lag risque d’être solide!

J’ai déjà visité plusieurs pays : États-Unis, Mexique, Angleterre, Grèce et Espagne, mais le Japon est de loin le pays le plus intéressant que j’ai eu la chance de voir. Je pourrais vous parler des magnifiques temples et palais, dont certains sont plusieurs fois millénaires, qui coexistent souvent avec des immeubles ultra-modernes, mais je veux plutôt témoigner de leur remarquable savoir-vivre et de l’importance du respect pour autrui dans leur société qui ne laisse aucun visiteur indifférent.

D’abord, les Japonais sont extrêmement gentils et serviables. Malgré que la très grande majorité ne parle pas un mot d'anglais, ils sont toujours prêts à aider dans la bonne humeur en mimant ou en pointant. Ils semblent tous très fiers de leur boulot, quel qu’il soit. Durant mon séjour de presque trois semaines, je n’ai vu aucune caissière, épiceries et dépanneurs confondus, si décali**ée que je pensais qu’elle allait s’ouvrir les veines devant mes yeux comme c’est souvent le cas à Montréal. À titre d’exemple, les employés à bords des trains du Shinkansen (train à grande vitesse japonais) se retournent systématiquement lorsqu’ils passent d’un wagon à l’autre pour faire une inclinaison (le salut japonais) en signe de respect pour les passagers. De la même façon, alors que mon avion s’éloignait du terminal à Tokyo, les employés qui étaient près de l’appareil ont arrêté leur travail quelques minutes pour nous saluer de la main. En contrepartie, je pense qu'il est absolument absurde d’espérer que les employés de la STM nous montrent un tel niveau de respect un jour.

Ensuite, les vols semblent très rares; j’ai vu plusieurs Japonais laisser leurs effets personnels sans surveillance : une dame a laissé son sac à bagages sans surveillance à l’entrée du dépanneur, une autre a laissé son sac à main sans surveillance sur la table d’un café alors qu’elle allait à la salle de bain, les bicyclettes ne sont généralement pas cadenassées et la plupart des magasins sont dotés d’un présentoir à parapluies ou parasoleils qui ne permet pas de les verrouiller, mais qui sont quand même toujours pleins. Les marchands aussi sont très honnêtes; le prix indiqué est toujours le prix payé (le pourboire et les taxes sont inclus) et il n’y a pas de surprises, voire de supposées « erreurs » de commande comme c’est souvent le cas ailleurs, et ce, malgré une barrière linguistique importante.

Le Japon est également un endroit très propre. Les trottoirs sont absolument dépourvus de toutes formes de déchets, de mégots de cigarettes ou de gommes à mâcher collés. Le plus surprenant c’est qu’il n’y a aucune poubelle publique; les gens traînent simplement leurs déchets, mégots compris, avec eux. Autre exemple de propreté : les toilettes publiques, même celles des 7-Eleven, sont impeccables. Certaines d’entre elles étaient si propres qu’elles auraient probablement pu servir pour une opération à cœur ouvert. De plus, la majorité des cabines ont un distributeur de savon antimicrobien pour nettoyer le siège. En parlant de toilettes publiques, la plupart des établissements ont deux types de toilettes : japonaise et occidentale. Dans le premier cas, on doit s’accroupir au-dessus d’un bol en céramique au ras du sol qui a un peu la forme d’une pilule (aussi appelé « squating toilets »). Le second type est généralement muni d’un siège « high-tech » qui comprend un banc chauffant à température variable, une fonction bidet à pression ajustable montée sur un petit bras rétractable autonettoyant et un système audio qui peut reproduire des bruits d’eau pour masquer vos indiscrétions. Mesdames, certaines toilettes publiques vous permettront même d’essayer un urinoir féminin! Bref, je sens que je vais m’ennuyer du Japon chaque fois que je vais devoir utiliser nos toilettes publiques.

Si vous séjournez au Japon, vous remarquerez que les Japonais ont tous une petite serviette qu’ils traînent dans leur poche. Elles semblent avoir trois fonctions : s’essuyer les mains parce que plusieurs toilettes publiques n’ont (surprenamment!) rien de prévu à cet effet, éponger la sueur du visage lors des grandes chaleurs, mais aussi, couvrir sa bouche quand on tousse. Je viens d’ailleurs tout juste de prendre connaissance de cette dernière fonction au moment même où j’écris ces lignes. J’ai un rhume et la passagère à ma gauche semble particulièrement incommodée par ma toux. Elle m’a demandé, très poliment, si j’avais oublié ma serviette en me proposant, du même coup, d’emprunter la sienne. Au début je pensais qu’elle voulait que je m’en serve comme mouchoir (yark!) et j’ai décliné son offre. Quelques minutes plus tard, elle m’a relancé en m’indiquant qu’elle voulait que je la mette devant ma bouche. Comme je ne savais pas combien de fois elle avait déjà toussé dedans j’ai encore refusé son offre, mais je lui ai quand même dit que j’allais tousser dans ma couverture Air Canada au lieu d’utiliser l’intérieur de mon coude si ça lui faisait plaisir. Finalement il semble qu’elle voulait que je m’en serve comme si c’était un masque et comme j’ai refusé elle se couvre maintenant le nez et la bouche en permanence avec sa serviette et elle se tient le plus loin possible. Elle doit penser que je suis le pire des mal élevés... Il reste neuf heures de vol, elle va trouver le temps long...