L'Heuristique: Journal des étudiants de l'ÉTS

Plus d'argent pour l'AÉÉTS

Septembre 2017 » Vie étudiante » Par Félix-Antoine Tremblay, étudiant de maîtrise, non-membre de l’AÉÉTS

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Photo par 401(K) 2012, Flickr

En mars dernier, il était annoncé en primeur dans L'Heuristique que l'Association étudiante de l’ÉTS (AEETS) comptait augmenter sa cotisation de 25 à 35 $ par session. Cette information a finalement été confirmée dans l'avis de convocation de l'assemblée générale du 28 juin.

Dans ce même avis de convocation, on trouvait un document intitulé Présentation du budget 2017-2018. En introduction, on y affirmait que les besoins de l'Association avaient augmenté depuis la dernière hausse de cotisation. Jetons-y un coup d'oeil.

Un campus en pleine expansion

La dernière augmentation de la cotisation remonte à 2005. À l'époque, le pavillon E n'était encore qu'un stationnement, il n'y avait pas de Resto-pub, l'ÉTS comptait deux fois moins d'étudiant(e)s et Facebook n'était pas encore accessible au public. Bref, 2005, c'était il y a 12 ans. Logique, donc, d'augmenter la cotisation?

Pas vraiment. L’année 2005 est celle où l'AÉÉTS a contracté un prêt pour financer le Resto-pub. Celui-ci est arrivé à échéance après 10 ans, en 2014. La cotisation devait alors redescendre à 20 $, mais ça n'a pas été le cas. La voilà, la fameuse augmentation en fonction de l'inflation que requiert actuellement l'AÉÉTS.

Le débat a cependant déjà eu lieu, en 2014. Lors de son congrès hivernal, le conseil d'administration (CA) a retenu deux options, dont aucune n'incluait le retour au montant d'origine. La première : 23,50 $, soit l'inflation. La deuxième : 25 $, soit le montant de l'année précédente. L'Assemblée générale a finalement choisi la deuxième option.

Des besoins grandissants

L'AÉÉTS a cependant des besoins grandissants. Heureusement, sa cotisation est prélevée auprès de chacun(e) de ses membres. De ce fait, depuis 2005, elle a vu ses revenus en cotisations doubler.

Pourtant, les coûts de base pour sa gestion n'ont à peu près pas changé : quatre employé(e)s pour la comptabilité, le secrétariat, et la gestion du Resto-pub et du Dépanneur. Les dépenses supplémentaires proviendraient des activités étudiantes : clubs, regroupements, comités, délégations, événements, etc.

En consultant les anciens budgets (publics de 2012 à 2015[1]), on remarque effectivement que les dépenses liées aux activités de l'Association augmentent de façon constante. Il en va cependant de même pour ses surplus.

Au cours de cette période, l'AÉÉTS a accumulé 1 M$ en trop perçus. Mathieu Drolet, alors vice-président des finances et candidat à la présidence, reconnaissait lui-même, à la session d'hiver 2016, que l'Association possédait 735 k$ en trop dans ses coffres. Les dernières données disponibles pour l’année qui se terminait alors indiquaient un surplus à prévoir de 200 k$.

Où sont passés les surplus?

Durant le premier mandat présidentiel de Mathieu Drolet, la situation financière de l'AÉÉTS serait passée d'extrêmement confortable à précaire. C'est du moins ce que le document de présentation laisse entendre. Faute d'augmentation de la cotisation, on y annonce des compressions dans presque tous les postes budgétaires.

Au cours de la dernière année, seuls deux projets majeurs ont été financés par l'Association : la rénovation du Resto-pub et celle du siège social. En juin 2016, ces projets étaient évalués par le CA à 200 k$.

De façon conservatrice, on peut donc affirmer qu'il restait au moins 0,5 M$ dans les coffres de l'Association. Pour se retrouver en situation critique, l'AÉÉTS serait donc passée d'un surplus de 200 k$ pour l'exercice 2015-2016 à un déficit de 700 k$ pour celui de 2016-2017. On ne trouve pas d’informations à ce sujet dans le document de présentation.

Présentation du budget 2017-2018

Le budget est présenté d'une façon très particulière cette année. Une série de tableaux présente trois scénarios : le statu quo (catastrophique), l'augmentation de 6,50 $ (ennuyante) et l'augmentation de 10 $ (paradisiaque).

Le statu quo est catastrophique, puisqu'il commande des compressions systématiques. Pour trouver une raison à ces compressions, on ne peut que pointer du doigt la gestion des priorités de l'Association. Comment l'AÉÉTS justifie-t-elle son siège social tout neuf alors qu’elle compte couper dans les services offerts à ses membres?

Le document de présentation ne répond pas non plus à cette question. En fait, il ne fait que comparer une panoplie d'informations strictement qualitatives (ironique, pour un document d'ordre financier).

Parmi ces informations, on découvre par exemple qu'à 35 $, le regroupement des clubs étudiants recevra plus d'argent qu'il n'en a demandé; qu'à 31,50 $, il y aura " moins de toute " lors du party de clôture; et qu'à 25 $ la contingence (montant dédié aux imprévus) sera légèrement inférieure à 5 % des revenus de l'Association, soit une somme de 53 k$, si l'on se base sur les revenus prévus en 2015-2016.

De grossières erreurs

Il est intéressant de noter que l'on retranche systématiquement 1,50 $ de tous les montants de cotisation prévus. On explique que cela est causé par le montant de 3 $ prélevé à la dernière session de chaque étudiant(e) au baccalauréat et remis à « l'association des diplômée » [sic]. Cette estimation est malhonnête.

En effet, le baccalauréat comporte normalement 11 sessions à l'ÉTS. Puisque les étudiant(e)s ne diplôment qu'une seule fois, s’il y a lieu, on peut conclure que le montant à retrancher est d’au plus un onzième de 3 $. De surcroît, le quart des membres de l'AÉÉTS étudient aux cycles supérieurs et ne paient jamais ce montant.

Selon les chiffres de l’année 2015-2016, la fraction des membres payant ce montant est encore plus petite. Pour cette année, on comptait seulement 893 finissant(e)s pour 22 325 paiements de la cotisation, soit un vingt-cinquième. En supposant une distribution similaire pour l’exercice 2017-2018, on peut estimer que le montant à retirer pour l’année à venir est de 0,12 $, une différence de 1,38 $ avec l’estimation de l’Association. Cela représente au total 34 k$, ou 14 % de l'augmentation prévue.

Dans le document de présentation, on peut également observer que la cotisation de la session d’été n’a pas été augmentée. En effet, au moment d’adopter le budget de l’année 2017-2018, les frais de scolarité pour cette session ont déjà été prélevés. De ce fait, avec une cotisation à 35 $,  la hausse de revenus serait de 174 k$ pour la première année, mais de 243 k$ pour une année complète, soit 69 k$ supplémentaires.

Lorsque l’AÉÉTS évalue ses besoins à 10 $ par session, cette année, elle omet donc de considérer qu’elle percevra 2,84 $ en trop pour toutes les sessions suivantes. En combinant cette somme au montant de 1,38 $ discuté précédemment, c’est donc 42 % de la hausse qui n’est pas pris en compte dans le budget de l’Association.

Improvisation, incompétence ou malhonnêteté

Il ne s'agit pas de la première fois où l'on tente d'augmenter la cotisation et, aux dernières nouvelles, l'AÉÉTS générait d'importants surplus, année après année. La hausse actuellement proposée est, dans sa forme actuelle, absolument injustifiée. Le document fourni aux fins de présentation ne remplit pas son rôle et, tel que démontré ci-dessus, n'est pas fiable.

On doit donc se demander si ce geste a été maladroitement improvisé par un vice-président des finances en poste depuis quelques semaines à peine, ou s'il est plutôt le résultat d'un mélange d'incompétence et de malhonnêteté. Le cas échéant, qui se trouve derrière ce projet?

[1] Budget 2012-2013 : http://bit.ly/2sauDtL;
Budget 2013-2014 : http://bit.ly/2tdlpfd;
Budget 2014-2015 : http://bit.ly/2saZXIJ;
Budget 2015-2016 : http://bit.ly/2tQ2GnX