L'Heuristique: Journal des étudiants de l'ÉTS

Rectifions les faits rectifiés - La Maison des étudiants [sic]

Février 2013 » Campus » Par Félix-Antoine Tremblay, étudiant de maîtrise, chef de pupitre du JETS

Il est tout à fait honorable de la part de l’École de technologie supérieure (ÉTS) d’avoir fait suite à l’article Les Étudiants et étudiantes mis à contribution pour des fantaisies immobilières paru dans l’édition de novembre du Journal de l'ÉTS (JETS). Toutefois, considérant l’avantage incontestable de sa méthode de diffusion, il aurait été de bonne guerre d’inclure l’article auquel elle fait référence. Par ailleurs, il est à noter que cette édition contenait une erreur de montage et que dans l’article, entre le quatrième et le cinquième paragraphe, la phrase suivante aurait dû être présente et joindre ces mêmes paragraphes : « On peut légitimement se demander en quoi il est si anormal pour une université d’offrir des locaux dédiés à la vie étudiante qu’elle doive quémander une subvention de la part de ses étudiants et étudiantes pour les financer ». Voici donc la rectification des « faits rectifiés » de la lettre lettre de l'ÉTS.

Fantaisie¹ immobilière 

La lettre de réponse de l’ÉTS critique la comparaison, dans l’article, entre la Maison des étudiants [sic] (MDÉ) et les projets controversés des autres universités. Le fait est que c’est parfaitement légitime, car en quoi l’ÉTS devrait-elle être exclue de la masse universitaire? En ce qu’elle gère bien ses fonds? Possiblement, toutefois, l’absence de mauvaise gestion par le passé ne protège pas l’ÉTS des erreurs futures, c’est d’ailleurs ce qu’on apprend dans les cours de gestion dispensés par l’ÉTS. La MDÉ est donc comparable aux autres projets et l’histoire montre clairement que les étudiants et étudiantes font bien d’être méfiants par rapport à un tel développement.

Pour ce qui est du côté fantaisiste de la chose, il semble que l’ÉTS se justifie par la fréquentation accrue de son établissement, ce qui est conséquent. La capacité théorique établie de l’ÉTS est en ce moment dépassée, mais le gouvernement du Québec a des standards précis pour investir dans un projet de ce type et ceux-ci ne sont pas encore atteints. L’ÉTS compte donc damer le pion au gouvernement et développer son campus sans subvention directe du gouvernement. Il faut ici faire la distinction entre développer son campus, fantaisie¹ immobilière, et augmenter sa capacité, car dans le projet de la MDÉ, jamais il n’y a mention de l’ajout de quelconques locaux de classe.

On pourrait supposer que les locaux déplacés dans la MDÉ tels ceux des Services aux étudiants [sic] seront transformés en locaux de classe. Par contre, si c’est à la logique des étudiants et étudiantes qu’on en appelle dans ce document, ne serait-il justement pas plus logique d’inclure directement de nouveaux locaux dans la MDÉ, advenant que ce soit vraiment le but recherché? L’ÉTS n’hésite pourtant pas à déclarer que son documentPrésentation de la Maison des étudiants [sic] est tout à fait clair.

Document de présentation trompeur² et référendum éclair

Après plusieurs semaines de consultations fréquentes du document Présentation de la Maison des étudiants [sic] daté du 11 septembre, il est toujours difficile d’assimiler et de comprendre ce document nébuleux. Du haut de ses 59 pages, il en contient un total de 33 sur le projet dans ses formes précédentes contre seulement 17 pour sa forme proposée. Il est également à noter que pour ces 33 pages, aucune note n'indique l'exclusion de ces projets dans la version proposée, encore une fois un appel à la compréhension implicite du lectorat. Pour ce qui est de l'absence du coût total ou du coût par étudiant ou étudiante dans le document, le secrétaire général ne se justifie pas. Ce document, aussi « clair » qu’il soit, tout comme la lettre de réponse de l’ÉTS, ne réussit pas à cacher sa vraie nature : un document propagandiste. Toutefois, la clarté est subjective, il est donc à la population étudiante d’en juger, mais difficile de passer outre ces faits troublants.

Il est important de rappeler que la compréhension, nonobstant la clarté du document quelle qu’elle soit, est tributaire du temps de réflexion mis à la disposition des membres de l’AÉÉTS. Le référendum Internet tenu en vitesse, clos le 17 septembre à 23h59, a laissé une période « considérable » de sept jours pour cette réflexion, suite au dévoilement de la dernière itération du projet. Toutefois, on ne compte que cinq jours entre la mise en circulation électronique du document, le 13 septembre, et la clôture du référendum. De plus, seul un document de la partie promotrice du projet a été publié, ce qui est normal dans un contexte commercial, mais qui l’est moins dans une optique de collaboration et de respect pour ses étudiants et étudiantes. D’ailleurs, il ne faut pas oublier que cette consultation éclair s’est tenue environ deux semaines avant l’arrivée de la cohorte d’octobre. Cette cohorte pour qui la période du 11 au 17 septembre correspondait à une période d’études à un rythme insoutenable. Ces membres n’ont donc pas eu l’occasion de participer pleinement au processus qu’a été le référendum sur la MDÉ.

Même si ces étudiants et étudiantes avaient voulu pleinement participer, aucune assemblée générale ni séance de plénière n’a été tenue entre la publication du document et la clôture du référendum. On a par contre tenu une séance de discussion Internet le 13 septembre à 15h15 avec le directeur général de l’ÉTS, ce qui contrevient aux règles? d’un référendum, mais ce n’est rien de nouveau. Cette publicité pendant le référendum est décriée par plusieurs depuis le jour du dévoilement des résultats du référendum, dévoilement ayant par ailleurs eu lieu suite à celui destiné à l’administration, un autre accroc au protocole?.

Fonds publics?

Pour ce qui est de l’utilisation de fonds publics?, il est très important de noter que dans sa lettre de réponse, l’ÉTS prend soin de préciser en conclusion : « financement public provenant du ministère de l’Enseignement supérieur ». Cette distinction a pour effet de séparer les fonds publics? des fonds publics? de provenance gouvernementale. C’est qu’en tant qu’organisme public, le financement de l’ÉTS vient de deux endroits, de l’État et de ses autres sources de financement, notamment ses étudiants et étudiantes et ses partenaires commerciaux. Toutefois, l’ensemble de ces fonds est public en ce sens qu’il appartient à un organisme public.

Il ne faut pas oublier que chaque dollar dépensé dans la MDÉ est un dollar qui aurait pu être investi dans la fonction première de toute université, l’éducation. Bien que l’ÉTS se défende en affirmant que les revenus commerciaux sont suffisants pour financer son projet, dans son cadre financier, on note que le flux financier total sur les 25 premières années sera de - 3 831 147 $. Ces fonds auraient pu être investis dans l’éducation pendant ces 25 années.

Pour ce qui est de la subvention annuelle de 390 000 $, on suggère que celle-ci sera perçue au montant de 20 $ par session par étudiant et étudiante pour trois sessions? par année. Cependant, avec de possibles variations à la baisse dans le nombre total d’étudiants et d’étudiantes inscrits, soit moins de 6 500 pour chacune des sessions, la résultante serait une baisse de revenus. Forcément, cette baisse devra être compensée par une entrée d’argent extérieure. Celle-ci viendrait possiblement des FIO ou des autres fonds publics à la disposition de l'ÉTS. Il faut savoir que la contribution de 20 $ est, si l’on se fie aux dires du directeur général lors de la présentation du 11 septembre, un montant maximal et ne pourra donc pas compenser une possible baisse de fréquentation.

Pour conclure, le projet de l’ÉTS est parfaitement comparable aux autres projets semblables et est, par le fait même, risqué. Le document de présentation est tout à fait trompeur² et le financement du projet est problématique, autant au niveau éthique qu’économique. Pour ce qui est de la bonne foi de l’administration en ce qui a trait aux consultations dès 2008, il est à noter que la version finale fait presque totalement abstraction de celles-ci. Quant à la « forte utilité » des commerces de la MDÉ, l’ÉTS accueille déjà un guichet bancaire et autour de l’université se trouvent une Caisse Desjardins à 600 mètres ainsi que deux pharmacies et une clinique médicale, sans rendez-vous, dans un rayon de 850 mètres. Il y a fort à parier que cette abondance fait déjà amplement l’affaire des résidents et résidentes du quartier. Par ailleurs, il serait intéressant de voir les études qui appuient la conclusion pompeuse de la lettre de réponse de l’ÉTS : « partout où ce type d'initiative a été mis en place, le niveau de satisfaction relatif à l'expérience étudiante a toujours été largement positif ».

N.B.

Toutes les dates mentionnées réfèrent à l’année 2012

Fantaisie¹

Désir bizarre, fantasque, ne correspondant à aucun besoin essentiel (Larousse) 

Trompeur² 

Qui trompe³, induit en erreur, fait illusion (Larousse)

Tromper³

Échapper à quelqu'un, à sa vigilance, son attention, [le] déjouer par ruse, [feinter]. Faire faire à quelqu'un une erreur de jugement, d'appréciation (Larousse)

Règles?

Référence à l’article 1.4.5. de la charte de l’AÉÉTS (selon la version disponible aux membres - 2012.1.)

Protocole?

Référence à l’article 1.4.17. de la charte de l’AÉÉTS (selon la version disponible aux membres - 2012.1.)

Fonds publics?

All moneys deposited with the college regardless of source (e.g. state and federal funds, grants, contracts, donations). (Collège communautaire du comté de Suffolk, glossaire des termes financiers)

Trois sessions?

Il n’est pas obligatoire pour chaque étudiant et étudiante de s’inscrire à trois sessions par année ce qui peut également modifier les revenus