L'Heuristique: Journal des étudiants de l'ÉTS

Résumé de 2018 dans l’espace

Février 2019 » Technologie » Par Dmitri Moskalik, étudiant de génie mécanique,    

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La navette SpaceShipTwo et l’avion porteur White Knight Two
Photo par Virgin Galactic/Mark Greenberg

En 2018, les habitants de la Terre ont réalisé 114 lancements spatiaux. Pour la première fois en 38 ans, il y a eu plus de 100 lancements de fusées spatiales qui ont permis d’innombrables innovations scientifiques.

L’avancement de la science

Bonne chance à celui ou celle qui trouve un scientifique de la NASA qui n’a rien fait en 2018. En effet, la National Aeronautics and Space Administration a plus de 70 missions actives. Après un délai de 26 mois causé par un problème de mise sous pression, cette agence a lancé en mai et fait atterrir en novembre une autre sonde spatiale sur Mars, la sonde InSight (Interior Exploration using Seismic Investigations, Geodesy and Heat Transport). Comme son acronyme l’indique, cette sonde est dédiée à l’étude de la structure interne et de l’évolution géologique de la planète. Les données recueillies permettront d’approfondir les modèles de la création de toutes les planètes rocheuses. La sonde devient le 12e objet lancé sur la surface de Mars depuis la Terre. Malheureusement, avec la dernière transmission de l’astromobile Opportunity effectuée en juin, il ne reste que deux objets artificiels actifs sur la surface de cette planète, l’astromobile Curiosity et la sonde InSight.

De plus, en collaboration avec le MIT (Massachusetts Institute of Technology), la NASA a lancé en avril le satellite TESS (Transiting Exoplanet Survey Satellite). Ce satellite a pour mission de rechercher et recenser des exoplanètes (des planètes en dehors de notre système solaire) avec l’objectif de trouver des planètes habitables. Plusieurs mathématiciens et physiciens ont contribué à concevoir l’orbite de ce satellite, une trajectoire particulière jamais utilisée auparavant. TESS a utilisé une aide gravitationnelle de la Lune pour se placer sur une orbite elliptique, maximisant son temps d’observation du ciel tout en permettant une transmission efficace des données vers la Terre. Depuis sa mise en service, ce satellite a recensé plus de 200 exoplanètes et il est estimé que plus de 20 000 seront découvertes avant la fin de sa mission prévue pour 2020.

Par ailleurs, saviez-vous qu’il y a des vents dans l’espace? En effet, depuis le 20e siècle, plusieurs observations portent à croire que notre soleil éjecte un flux de plasma à haute vélocité créant ainsi un vent solaire. C’est pour étudier ce phénomène que la NASA a lancé en août la sonde spatiale Parker (Parker Solar Probe). Un peu comme TESS, cette sonde utilisera une assistance gravitationnelle de Vénus cette fois-ci pour se placer sur une orbite autour du soleil. Une fois, c’est bien; deux, c’est mieux; mais la sonde spatiale Parker survolera sept fois Vénus pour réduire graduellement son orbite et pour se rapprocher de plus en plus du soleil. Les mathématiciens ne sont pas les seuls héros de cette mission, car pour résister à l’énorme flux thermique du soleil à une distance aussi proche, les ingénieurs en matériaux ont conçu un bouclier spécialement pour cette sonde. Ce bouclier thermique, fait principalement en mousse de carbone, permet de garder les instruments de la sonde autour de 30 °C alors que la surface exposée directement au soleil atteindra plus de 1370 °C. Il est prévu que la sonde effectue 24 orbites autour du soleil et atteigne une vitesse record de plus de 200 km/s.

Les compagnies privées

Le 6 février, la fusée Falcon Heavy de SpaceX a lancé une Tesla Roadster dans l’espace. Ce lancement n’est pas seulement un point culminant dans l’histoire de la compagnie, son succès dans un marché exclusif a motivé plusieurs entreprises à s’y lancer également. SpaceX a réussi plus de 20 lancements au courant de l’année et un nouveau modèle de fusée est en développement. Ce modèle, composé du vaisseau Starship et de la fusée Super Heavy, promet des voyages jusqu’à Mars. La construction d’un prototype a commencé en fin de 2018.

La compagnie Blue Origin, fondée par Jeff Bezos, le président-directeur général d’Amazon, est aussi engagée dans le marché aérospatial. La fusée New Shepard a continué son développement en 2018 avec deux vols d’essai et l’entreprise a signé des contrats commerciaux de lancements avec la NASA et l’armée de l’air des États-Unis. Bien qu’il ait encore beaucoup de travail à faire pour rattraper l’avantage technologique de SpaceX, Jeff Bezos a investi une partie considérable de ses revenus générés par Amazon dans Blue Origin, soit près d’un milliard pour l’année.

Également, malgré un accident mortel de leur prototype en 2014, Virgin Galactic fondée par Richard Branson, a réussi à faire voler dans l’espace le SpaceShipTwo en décembre. Cette compagnie vise à offrir un service de vols touristiques à ses clients. Comme un missile, la navette spatiale est suspendue à un avion porteur nommé White Knight Two qui la relâche à une altitude de 15 000 m (50 000 pi). La navette engage son moteur-fusée et propulse ses six passagers et les deux pilotes dans l’espace.

L’implication de la Chine

Tous ces succès ont également suscité l’intérêt de la Chine. En seulement trois ans, ce pays a investi plus de 500 M$ dans ces compagnies spatiales privées. En suivant l’exemple de SpaceX et de Blue Origin, quatre jeunes entreprises chinoises promettent d’en faire autant. En mai, le premier vol orbital par une compagnie chinoise a été réalisé par OneSpace. Par la suite, la compagnie iSpace a lancé trois satellites miniatures en novembre et la compagnie LinkSpace a démontré leur avancement technologique avec une fusée réutilisable. La fusée Zhuque-1 de la compagnie chinoise Landspace a malheureusement manqué la cible en novembre. Le satellite de communication que la fusée transportait ne s’est jamais rendu en orbite.

L’agence spatiale gouvernementale chinoise a également été très active en 2018. En plus de lancer des satellites de communication, de navigation et d’expériences scientifiques, leur programme d’exploration lunaire a fait un grand pas. Ils ont lancé deux sondes en orbite autour de la lune en 2007 et en 2010, devenant ainsi la 5e nation à accomplir une telle prouesse. En 2013, ils ont fait atterrir le premier objet sur la lune en 37 ans, une astromobile d’exploration baptisée Yutu. En décembre 2018, ils ont répété l’exploit en lançant la mission Chang’e 4. Ils sont encore dans les premières phases de leur programme d’exploration, mais l’agence spatiale prévoit déjà des vols avec équipage et l’installation d’une base permanente sur le pôle Sud de la lune afin d’extraire des ressources naturelles.

La contribution du Canada

Bien qu’aucun lancement de fusée n’ait été fait par une compagnie canadienne en 2018, l’Agence spatiale canadienne (ASC) a envoyé en décembre l’astronaute québécois David Saint-Jacques sur la station spatiale internationale. Il devient le neuvième Canadien envoyé dans l’espace et le premier depuis Chris Hadfield en 2013. Il est titulaire d’un baccalauréat en génie physique de l’École Polytechnique de Montréal, d’un doctorat en astrophysique de l’Université de Cambridge et d’un doctorat en médecine de l’Université Laval. David Saint-Jacques conduit des expériences scientifiques en santé à bord de la station et il y restera jusqu’en février 2019.

Les échecs

Malheureusement, trois lancements ont échoué en 2018. En janvier, le satellite secret de reconnaissance militaire Zuma lancé par SpaceX n’a jamais atteint son orbite. L’adaptateur reliant le satellite à la fusée est la cause de l’échec. Ce dernier ne l’a pas relâché dans l’espace comme prévu. Par la suite, et comme mentionné plus tôt, il y a eu l’échec de la fusée Zhuque-1 de la compagnie chinoise Landspace en novembre.

Contrairement à ces deux incidents, l’échec de la fusée Soyuz-MS en octobre impliquait deux astronautes. Heureusement, Aleksey Ovchinin et Nick Hague s’en sont sortis en vie et sans blessures. La fusée a explosé quelques minutes après son décollage, lors de la séparation des propulseurs d’appoint. Le système d’évacuation d’urgence a fonctionné à merveille et la capsule des astronautes a été éjectée comme prévu. L’équipage a atterri sain et sauf à environ 400 km du site de lancement et il a déjà prévu de revoler en février 2019. L’explosion de la fusée a provoqué une suspension des vols. L’échec est attribué à un mauvais capteur, qui a été endommagé lors de l’assemblage du propulseur d’appoint au corps central de la fusée. Cet incident a engendré une révision des normes de contrôle qualité du fabricant.

 

 
Première image de la sonde InSight
Photo par NASA
 
Explosion de fusée Soyuz
Photo par NASA