L'Heuristique: Journal des étudiants de l'ÉTS

Claude Dubois, parcours du p'tit cul

Mars 2018 » Culture » Par Josée Ratté, journaliste, études littéraires

Gabrielle Lebeau a publié aux éditions Les Intouchables, le 8 novembre 2017, Claude Dubois : biographie, son premier ouvrage journalistique. Celle qui a terminé des études universitaires en écriture de scénarios et création littéraire est une habituée de la prose, a notamment publié plusieurs nouvelles dans Mœbius, NYX et L’Organe.

L’auteure, qui n’a pas la prétention de devoir présenter Claude Dubois, pense qu’il a y tout de même un devoir de mémoire à accomplir. Selon elle, une biographie sur la carrière et l’œuvre du chanteur était plus que nécessaire. C’est donc armée de patience et de rigueur qu’elle s’attaque à l’énorme tâche de recréer le parcours de l’auteur, compositeur, interprète. Elle commence son ouvrage par une émouvante lettre qu’elle adresse au chanteur, puis poursuit l’hommage en dédiant l’ouvrage à celui qui l’a bercée jeune, qui l’a fait grandir à travers ses chansons et qui lui a donné, probablement, une partie de son goût pour l’écriture.

L’enfant terrible

Claude Dubois, auteur-compositeur-interprète né à Montréal en 1947, est décrit par certains comme l’enfant terrible de la chanson québécoise. Rebelle et généreux, le chanteur a laissé sa marque. Que ce soit la pop, le country, le rock, son répertoire varié lui a permis d’explorer la scène musicale du Québec. Dubois, anarchiste ou indépendantiste, selon les saisons de sa vie, sera fidèle à ses origines et restera un ardent défenseur de la langue française et fier de son identité québécoise et c’est ce que Gabrielle Lebeau tente de relater dans son ouvrage.

Cette dernière réussit, dans cette biographie, à dépeindre un Claude Dubois toujours resté humble et près de ses fans. Le portrait qu’elle dresse du « bum » de la rue Sanguinet conforte le lectorat dans l’idée que l’homme derrière les nombreux succès est accessible et authentique. Elle nous fait voyager de scène en scène à Québec, Paris, et ce, jusqu’à la dernière apparition qu’il fait en 2017 pour la fête nationale du Québec où il partage la scène avec son bon ami, Robert Charlebois.

On y apprend, notamment, que le chanteur n’a jamais eu le trac, jusqu’à ce qu’il ait atteint l’âge de 70 ans, que la carte du je-m’en-foutisme qu’il aura jouée tout au long de sa carrière tombe à la suite d’un don de moelle osseuse, fait par un fan, qu’il a été végétarien. Bien qu’il a été le premier à remplir le Forum et le Colisée de Québec, la personnalité franche et directe du chanteur n’a pas bougé avec le passage des années. On le comprend dans les propos rapportés par l’auteur, qu’il monte sur la scène pour recevoir un prix ou qu’il soit en entrevue, le chanteur garde la même ligne.

S’il était possible de résumer Claude Dubois en peu de mots, ceux-ci, retrouvés en page 313, seraient parfaitement appropriés. « Et parfois, face aux horreurs du monde, la crise économique, la guerre froide et la menace de bombes nucléaires, Claude Dunois préfère créer une chanson pour célébrer la beauté de la vie et lutter ainsi contre la morosité ambiante ».

Musicographie

On pourrait reprocher à Gabrielle Lebeau le côté historiographique de son œuvre qui est parsemée de repères historiques, sociologiques ou géographiques, mais ceux-ci sont pertinents pour mettre en contexte l’époque, les lieux ou encore les mouvements musicaux qui traversent la carrière de Claude Dubois. La biographie de 398 pages, bien que non autorisée par le chanteur, est une immense bible où s’y retrouvent des milliers de citations, de propos, de transcriptions d’entrevues. L’auteure a fait un travail colossal et a remis en ordre le tout en y ajoutant le contexte, les parutions d’albums et les shows donnés par le chanteur. Outre quelques erreurs de syntaxe, le propos est clair et la plume précise. La linéarité du récit est brisée à quelques reprises avec des retours en arrière qui servent le propos et y apporte des précisions nécessaires.

Lire Claude Dubois : biographie, c’est entreprendre une expédition dans le temps. C’est voyager au fil des compositions de Dubois, se retrouver dans une cafétéria, où il a presque écrit son premier album, J’ai souvenir encore, l’accompagner en Californie, à Paris en passant par Montréal, évidemment. L’auteure a eu la délicatesse de porter son attention sur les figures importantes qui l’entourent tout au long de sa carrière et qui l’ont aidé, en quelque sorte, à peaufiner son art, c’est réussi, on est transporté par l’ouvrage qui est difficile à déposer.