L'Heuristique: Journal des étudiants de l'ÉTS

Développement des hydrocarbures au Québec : les conditions du succès

Septembre 2014 » Technologie » Par Jean-François Thibault, étudiant de génie électrique, resp. des conférences midi ÉTS sur les enjeux énergétiques

Le gouvernement du Québec a finalement clarifié sa position sur le développement des hydrocarbures. Le premier ministre, Philippe Couillard, s’est dit « en faveur d'un développement prudent et respectueux de l'industrie des hydrocarbures au Québec ». Une évaluation environnementale spécifique sur l’exploration et l’exploitation du pétrole sur l’île d’Anticosti devrait avoir lieu à l’hiver 2015, alors qu’une évaluation environnementale stratégique (ÉES) de la filière des hydrocarbures devrait précéder le dépôt d’un projet de loi sur le sujet dès l’année prochaine. Cette ÉES devrait inclure l’étude des impacts environnementaux de la production du pétrole, du gaz de shale (aussi appelé, en langage populaire, gaz de schiste) et du transport des hydrocarbures sur l’ensemble du territoire québécois. Il s’agit d’une bonne nouvelle, car c’est précisément le vide législatif sur la question qui a suscité le plus d’inquiétudes chez les Québécoises et les Québécois au cours des dernières années.

Cela est compréhensible. Par exemple, la saga entourant le développement de la filière du gaz de shale il y a quelques années, illustre parfaitement le besoin d’un encadrement efficace des activités industrielles reliées aux hydrocarbures. À l’époque, aucune étude environnementale n’avait été menée par le BAPE sur les impacts environnementaux de cette industrie et la – très vieille – loi sur les mines était insuffisante pour encadrer ses activités. Il n’est donc pas étonnant que la population se soit mobilisée contre le développement du gaz de shale à l’époque, ne se sentant pas protégée.

De plus, il est à noter que l’industrie participera au processus d’évaluation. Notamment, Hydrocarbures Anticosti, consortium formé entre autres par le gouvernement du Québec et Pétrolia, procédera à des travaux d’explorations lui permettant de contribuer aux travaux de l’ÉES[2]. Cette attitude de collaboration qu’offre l’industrie aux processus décisionnels de l’État est la bonne. Pousser la note ne pourrait qu’amener la population à se mobiliser contre le développement des ressources pétrolières et gazières, comme l’expérience des dernières années le démontre clairement. Car quoiqu’on en pense, la manière dont l’exploitation des hydrocarbures s’exécutera sera l’un des éléments centraux qui détermineront l’acceptabilité sociale des éventuels projets reliés à cette filière industrielle.

Toutefois, l’établissement d’un cadre législatif demeure, à lui seul, insuffisant. Les ressources pétrolières et gazières étant non renouvelables, leur développement soulève des questions en lien avec l’équité intergénérationnelle. Il est donc crucial  que l’utilisation des fonds perçus par le gouvernement par rapport à l’industrie des hydrocarbures se fasse dans une perspective à long terme. La réduction de la dette publique, de même que  des investissements dans la recherche et le développement des technologies de l’énergie – en particulier les énergies renouvelables – sont des avenues à considérer par  le gouvernement.

En conclusion, la volonté du premier ministre québécois de doter le Québec d’un cadre législatif entourant l’exploration et l’exploitation des hydrocarbures est une bonne idée. Il est cependant important que ce soit accompagné d’une vision à long terme atteignant des objectifs d’équité intergénérationnelle. Le Québec n’a qu’une chance de bien faire les choses et il ne doit pas la rater.