Le modérantisme des élu(e)s de l’Association étudiante de l’ÉTS (AÉÉTS) ne date pas d’hier. Face à la mobilisation étudiante sans précédent de l’année 2012, cette facette s’était faite particulièrement visible. En effet, à l’époque, l’administration de l’Association avait travaillé contre l’intérêt de ses membres notamment en annulant une grève démocratiquement votée; en conspirant avec l’administration de l’ÉTS pour financer la Maison des étudiants [sic]; ainsi qu’en espionnant et en manipulant ses membres.

Ces événements avaient été relatés dans L’Heuristique dans les éditions de novembre 2014 à mars 2015 [1][2][3]. Malgré de nombreuses erreurs de parcours, comme le renversement de décisions de l’AG par le CA [4]; des élections bâclées [5][6][7]; et l’élection d’un président non étudiant [8], on aurait pu croire que l’AÉÉTS avait appris de ses erreurs. En effet, en tout début de mandat, la 40e administration de l’AÉÉTS avait fait l’effort de convoquer une assemblée générale uniquement afin de se conformer à une formalité réglementaire, soit l’entérinement des nouvelles et nouveaux élu(e)s [9].

Pourtant, la journée de grève du 27 septembre dernier a ramené les souvenirs de la période sombre qu’a été l’année 2012 à l’AÉÉTS. En effet, après que 96 % des 328 membres réuni(e)s en assemblée générale aient adopté, sept jours auparavant, un mandat de grève pour cette date, l’AÉÉTS n’a à peu près rien fait pour faire respecter ce mandat, au contraire.

D’emblée, l’administration de l’ÉTS a accordé une levée de cours en après-midi pour permettre aux étudiant(e)s de participer à la manifestation internationale pour le climat. Plutôt que de prendre des mesures visant à faire annuler les cours en matinée et en soirée, l’Association s’est contentée de ce gain minimal. En effet, sans même tenir un vote de grève, des dizaines d’administrations universitaires et cégépiennes du Québec, de même que la Commission scolaire de Montréal, avaient accordé cette levée de cours à leurs étudiant(e)s [10][11].

Malgré un libellé spécifiant littéralement « que cette grève débute le 27 septembre 2019 à 8 h et se termine le 27 septembre à 22 h » [12] et que ces heures aient été spécifiées dans un communiqué officiel daté du 20 septembre [13], un représentant de l’AÉÉTS a déclaré, au sujet de la durée de la grève, que « rendu là, c’est une question d’interprétation. » Questionné à cet effet, ce dernier a précisé que « le but [est] de marcher avec l’ÉTS, pas de partir en guerre contre eux. »

Pourtant, un communiqué de l’AÉÉTS [13] spécifiait que « cette grève [avait] entre autres pour objectif de lancer un message fort aux gouvernements sur les enjeux climatiques. » Avant de s’en excuser, cet élu a même affirmé, pour défendre l’inaction du conseil exécutif (CE), « [qu’ils avaient] été élus. » et que « la démocratie [avait] parlé. » Il a poursuivi en disant que « [son] mandat était clair », soit « donner du sérieux à l’AÉÉTS. » En parlant des étudiant(e)s mobilisé(e)s pour la grève, il a poursuivi en indiquant que « ce sont les irresponsables commes [sic] [eux] qui [...] causent du tors [sic] [à l’AÉÉTS] depuis trop longtemps ».

Ce type de commentaire n’est pas sans rappeler l’irrespect qu’exprimait le président de l’Association envers ses membres en 2012. À l’époque, celui-ci les avait traités de « bande de tarés » dans un courriel officiel destiné au CE. À la même période, en parlant des membres qui étaient insatisfaits de l’information offerte par l’Association, il disait que ce n’était pas à l’Exécutif de les « prendre par la main » et qu’ils n’avaient qu’à mourir.

Ironiquement, dans le cadre de la grève du 27 septembre, ce sont les membres qui ont dû prendre la main de l’Association et expliquer au CE ce en quoi consistait une grève. En effet, un exécutant a affirmé d’emblée que l’AÉÉTS « ne [ferait] ni piquetage ni bloquage [sic] ». Contacté à ce sujet les 23, 24 et 25 septembre, le président de l’Association n’a offert aucune réponse.

En ce qui a trait aux trois syndicats de l’ÉTS, ceux-ci ont réagi à l’annonce de la grève et d’un éventuel piquetage. Pour sa part, le Syndicat des employés de l’ÉTS (SEÉTS) a rapporté que l’AÉÉTS avait affirmé que le mandat de grève ne s’étendait qu’à l’après-midi. Quant à l’Association des maîtres d’enseignement de l’ÉTS (AMEÉTS), elle a demandé à ses membres de « donner leur [sic] cours et leurs séances de travaux pratiques le vendredi matin et le vendredi soir, si les conditions normales le permettent » et « [d’éviter] toute forme de confrontation et de situation potentiellement dangereuse pour la sécurité des personnes. » Même son de cloche du côté de l’Association des professeurs et professeures de l’ÉTS (APÉTS) qui a invité ses membres à éviter toute confrontation. L’APÉTS a poursuivi encourageant ses membres « à participer à la marche sur le climat et à supporter le mouvement international déclenché par Greta Thunbeg [sic] [...] ».

Au moment d’écrire ces lignes, soit le 25 septembre, l’AÉÉTS compte tenir, le jour de la grève, un atelier de confection de pancartes à 8 h, puis une tournée de classes informative de 9 h à 12 h, ainsi qu’un départ vers la manifestation pour y marcher « sous la bannière de l’ÉTS » [14]. Dans son second communiqué, l’AÉÉTS ne mentionne en aucun cas que celle-ci a pour mandat de tenir une grève en matinée et en soirée. Elle n’invite pas non plus ses membres à se joindre aux activités de piquetage, ni même à ne pas se présenter en classe.

Le comité ad hoc qui a mené au déclenchement de la grève est donc laissé à lui-même pour organiser celle-ci. Il lui est impossible, par exemple, de contacter les étudiant(e)s par courriel, avec les listes de l’Association. Il prévoit tout de même effectuer du piquetage dès 7 h 30, le 27 septembre.

Les gestes du CE vont non seulement à l’encontre du mandat adopté par les membres, mais ils sabotent les efforts de ceux et celles qui tentent de le faire respecter. En plus de nuire au respect de la grève, les actions conjointes de l’ÉTS et de l’AÉÉTS visant à créer de la confusion risquent de causer des situations de confrontation aux portes des différents pavillons. Comme l’a si bien dit un exécutant de l’AÉÉTS, au sujet de cette grève, « notre association étudiante ressemble de moins en moins à une association syndicale. »

Il convient de se demander à qui les exécutant(e)s tentent de plaire avec ces actions. L’ÉTS n’est pas l’alliée des étudiant(e)s et ce n’est pas par l’aplaventrisme que cela va changer. En cédant sur une question aussi fondamentale que son droit de grève, comment l’Association peut-elle espérer faire des gains sur les problématiques courantes que rencontrent ses membres? En annihilant la mobilisation de ses membres, elle nuit à tout rapport de force qu’elle pourrait un jour souhaiter mettre en place. En s’alliant à l’ÉTS, l’Association ne fait que contribuer à redorer l’image de l’École.

[1] La maison des étudiants [sic] - Une affaire de collusion, L’Heuristique lheuristique.ca/article.php?id=182